"8000 euros, c'est le prix d'une voiture d'occasion reformée en Europe !"
Bref entretien avec M. Assileck Halata
Bonjour Monsieur Mahamat Assileck Halata
Lyadish Blog (LB): La justice tchadienne vient de condamner à mort par contumace notamment les membres de l'UFDD. Pensez-vous que c'est là un moyen de pression utilisé par le gouvernement pour inciter la rébellion à venir à la table de négociation ?
Assileck Halata Mahamat (AHM) : D’abord, je vous remercie pour cet entretien. Au Tchad d'Idriss Déby, il n’y a pas de Justice. Par
essence, celui qui de droit prononce la justice, celui qui l'initie et l'ordonne doit être lisse des faits. Déby est à lui seul la somme de l'imperfection politique et démocratique, il est
le comble qui ridiculise le Tchad avec ses pratiques juridico-administratives.
Cette condamnation est la mesure d'un homme en souffrance avec lui-même, elle n'est pas et ne peut représenter l'aspiration du peuple tchadien. Cette mesure engage seulement le vœu d'un Déby aux abois. Quand aux responsables de l'UFDD, et de l'opposition d’une manière générale, cette décision ne les affecte pas un seul instant. Comprenez que quand on combat Idriss Déby par des moyens même légaux, on devient son ennemi. Il faut juste se dire que dès qu'on combat Idriss Déby on se condamne par avance car avec lui, ou c'est nous qui laissons notre peau, ou c'est lui. Tout de même, le moment viendra.
Quand à la négociation, sachez que l'opposition continuera toujours à prôner une table ronde inclusive de tous les fils du Tchad. Chose que ce même Déby s'y refuse.
L.B: Après une telle condamnation, la rébellion a-t-elle encore confiance à Déby pour la tenue d'un forum national de paix ?
A.H.M : Pouvez vous me présenter un seul Tchadien qui a confiance à Déby? Il faut se
remémorer juste le passé. Aucune personne en dehors de sa famille, et encore, ne peut faire confiance à Déby. Du Tchad à Paris qui reste une plaque tournante, il suffit juste de tendre l'oreille
et écouter les hommes politiques, les hommes d'affaires, les femmes du sérail, les garçons de courses, les saltimbanques démarcheurs, les agents de renseignements, les icônes lucratives. Tous
sans exception, vous diront ceci: "On ne peut avoir confiance envers Idriss Déby". Rassurez-vous, la résistance nationale dans son ensemble ne peut avoir confiance en lui. Cette
condamnation doit inspirer les responsables des mouvements politico-militaires à l'union car par dessus leurs divergences, Idriss Déby les mets tous dans le même sac. Qu'ils s'unissent !
Quand à un forum indicateur de paix, sa faisabilité doit être liée à d'autres partenaires internationaux, qui seront associés et qui aideront à émerger la confiance des Tchadiens. Personne
n'acceptera de rallier un dictateur finissant. Le cas de Monsieur Mahamat Nour Abdelkrim doit illuminer chacun d'entre nous.
L.B: Mais précisément, quelle attitude l'Alliance Nationale doit-elle adopter face à cette décision?
A.H.M : Le silence, le verdict du terrain militaire, et aboutir à l'aspiration du peuple tchadien en le faisant partir définitivement.
L.B: Autre actualité. Mansour Abbas qui a été représentant de l'UFDD en France vient de rejoindre le régime de N'Djamèna à la surprise générale. Quel est votre sentiment face à ce transfuge ? Pensez-vous que cette défection est une trahison?
A.H.M : Au départ, je ne voulais pas évoquer ce cas car je reste surpris de la médiatisation de la chose. Comme nous y sommes, je joue franc-jeu.
Il y'a de l'amertume. Pas vis-à-vis de l'homme, mais de la nature des faits. Je peux comprendre une frustration, un ego chiffonné, mais non piétiner ses idéaux. De nos jours, et à l'image de beaucoup de personne, le Tchad est pris en otage par des énergumènes qui dénaturent les fondamentaux de la résistance en changeant de camps comme on change de chemises. Les tchadiens sont pris en otage par des individus qui méprisent les idéaux du changement. Ils n'ont du respect que pour leur portefeuille et leur personne. Ils n’ont même pas de respect pour le sang des martyrs, des amis avec lesquels plusieurs sceaux ont été posés. Pour toute personne sensée, toute personne inscrite dans une dynamique d'ensemble, un idéal, il est évident que c'est de la trahison.
L.B: Mais Mansour Abbas aurait quitté l'UFDD notamment pour avoir été ostracisé. Il n'aurait aucun contact avec la hiérarchie depuis l'après 2 février 2008. N’est-on pas en présence d’un acte désespéré ?
A.H.M : Je n'ai jamais constaté un sentiment d'ostracisme depuis que nous militons ensemble. Il y'a incontestablement des divergences de point de vue. Des entités d'appréciation ou de désapprobation peuvent aussi exister. Ce qui est grave, c'est les sentiments de travers, les interprétations de faits avec des conclusions hâtives aboutissent toujours à cette donne. Dans le mouvement, tout le monde ne peut pas être en contact avec tout le monde. On n'est pas l'ami de l'autre par hasard. Aussi, quand on veut parler à une hiérarchie, cela se fait de façon simple suivant la disponibilité de l'un ou de l'autre. Tout comme on n’est pas appelé à être en contact absolu avec tel ou tel membre pour faire son travail. Ceux qui y pensent ainsi doivent avoir une vision limitée. Néanmoins, il faut faire de la ressource humaine et gérer le facteur susceptibilité. Non, ce n'est pas vrai que depuis le 02 février 2008, Mansour Abbas n'a pu joindre une hiérarchie.
L.B: Soit ! Maintenant que Mansour Abbas a quitté le mouvement, qui sera désigné pour le remplacer? Qui assure l'intérim pour l'instant ?
AHM : L'UFDD est une structure. On avait Mansour Abbas comme représentant, mais l'essentiel du capital travail est fait par les membres. Comme vous le savez, l'ex-représentant est un homme nouveau dans ce paysage de la résistance nationale. Il a été entouré, épaulé et conseillé pour qu'autant de travaux puissent aboutir. Il est évident que pour la réorganisation de la représentation UFDD-France, la hiérarchie devra rapidement décider et prendre en compte cette nouvelle situation.
L.B: D'aucuns pensent que l'aile politique extérieure de l'UFDD ne dispose d'aucun moyen financier pour assurer sa mission. Comment faites-vous pour travailler? Quelles sont vos ressources et pourquoi aucun budget n'est prévu pour le fonctionnement de l'aile politique extérieure?
L.B: Mais Mansour Abbas semble avoir préféré partir avec Déby notamment pour ces motifs ?
AHM : Non, cela est un faux problème. Beaucoup ont fait pareil, attendons de voir la phase 2 de sa bévue. 8000 euros, c'est le prix d'une voiture d'occasion reformée en
Europe ! Prions qu'il ne regrette point un jour ses faits.
L.B: Soyons réalistes, Monsieur Halata. Ne pensez-vous pas que si elle a les moyens, l'UFDD doit motiver ses membres afin de les retenir face à la tentation de se laisser appâter par les millions qu'offrent Idriss Déby?
AHM : Évidemment. Au delà de L'UFDD, tous les responsables de la lutte armée doivent encourager et motiver leurs membres de l'extérieur qui font un travail assez complémentaire aux hommes en arme. Il n'y a pas seulement l'aspect financier qui compte.
L.B: Pour clore ce bref entretien, que pouvez-vous nous dire sur l'organisation générale de l'Alliance Nationale (les rapports avec les autres mouvements, etc.)
AHM : L’Alliance Nationale est une organisation qui est ouverte à tous les autres mouvements politico-militaires. Personne en son sein ne lutte pour la confiscation du pouvoir. Les objectifs sont clairs comme l'a indiqué son président, le général Mahamat Nouri sur la chaîne qatarie
Al Jazeera le dimanche 17/08/08. Une transition de 6 mois à un an, un forum national avec toutes les sensibilités tchadienne et dans la foulée l'organisation des élections libres et démocratiques.
L.B: Je vous remercie
Merci à vous
ASSILECK HALATA Mahamat
Délégué à la représentation UFDD-France
Coordinateur de la cellule d'information et communication Europe
de l'Alliance Nationale. (AN)