"Sans la France, Idriss Déby n’aurait vraisemblablement pas été capable de repousser l’offensive rebelle en provenance du Soudan. Avortée, cette tentative n’a pas pour autant engendré la défaite complète des forces rebelles. Le pouvoir tchadien, un temps acculé dans le palais présidentiel, s’est même vu proposer l’évacuation. Les hésitations de Paris, liées comme on peut le supposer à l’affaire de l’Arche de Zoé, ont ainsi finalement penché vers l’aide militaire au pouvoir tchadien [8].
Quant au caractère légitime du gouvernement tchadien invoqué par Kouchner et Sarkozy, il est permis d’en douter – au mieux - vue la manière dont il a pris le pouvoir en 1990 et la façon dont il a été réélu depuis. Au lendemain de sa victoire, il en a d’ailleurs profité pour expulser de la capitale plusieurs milliers de civils ainsi que faire disparaître plusieurs figures importantes de l’opposition politique. Interrogé sur cette question, Déby a répondu qu’il n’avait que faire de ces « détails » puisque il était engagé à « sauver » son pays. A ce jour, plusieurs sont réapparus mais d’autres comme Ibni Oumar Mahamat Saleh sont toujours portés disparus. Pis, beaucoup s’étonnent que ni l’aide militaire durant cette offensive ni l’opération Eufor qui permet à Déby comme il l’a lui-même concédé, de disposer de davantage de force, n’ait été davantage utilisé comme un moyen de faire pression vers une ouverture politique du régime tchadien. Dans ce cadre, il est trop tôt pour savoir si le récent changement de Premier ministre intervenu en avril dernier, qui a fait de la résolution des questions internes une priorité et considéré comme plus proche des opposants, constitue une stratégie politique ou un réel effort. Le problème du côté français est que comme souvent l’affaire est présentée de manière plutôt simpliste, soit c’est Déby soit c’est les rebelles, et donc la mainmise de Khartoum (Soudan) sur la région, en omettant de préciser qu’il existe tout de même une opposition civile au Tchad.
Darfour : pourquoi l’Europe se trompe (2/2)