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Que les moutons de panurge se rassurent ! Cette petite chronique n’est pas une réplique à leur décoction d’anecdotes éculées me concernant, notamment, publiée sur le Blog pro Déby par un vulgaire plumitif qui a tout d'un traître congénital. Une bouche à pipe ne mérite que mépris. Ses (ces) écrits vains ne m’impressionnent pas. Bien au contraire !

 

Dérives totalitaires

 

Les dérives totalitaires qui méritent que l’on s’y attarde sont celles du régime de N’Djamena qui ne cesse depuis quelques années de multiplier impunément les atteintes à la démocratie et aux libertés individuelles et collectives des citoyens.

 

Jusqu’à une époque récente, pour faire face à des prétendues menaces graves et immédiates sur les institutions de la République, l'intégrité du territoire ou l'exécution de ses engagements internationaux, les mesures limitatives des libertés (celle de circuler par exemple) sont prises par le gouvernement sous le couvert des textes relatifs à l’état d’urgence.

 

Paradoxalement, lundi à l’issue d’un conseil extraordinaire des ministres, un certain nombre de mesures liberticides jamais prises sous le règne de l’autocrate de N’Djamena ont été illégalement adoptées, au nez et à la barbe des députés de l'opposition et des conseillers constitutionnels.

 

Sous le prétexte d’une rupture unilatérale, par El Béchir, des relations diplomatiques tchado-soudanaises, après l’attaque de Khartoum par les rebelles du MJE (soutenus par Déby), le chef de l’Etat tchadien et son nouveau gouvernement de « nourriture » avaient, sans s'embarrasser de la Constitution, décidé, lors de ce conseil des « milices », d’adopter des mesures préventives (‘‘prévoyance’’ dans le compte-rendu gouvernemental) à une éventuelle riposte d’envergure par le Soudan contre N’Djamena.

 

Ces mesures, prétendument destinées à « protéger les intérêts économiques et culturels et se mettre à l’abri de toute surprise » consistent logiquement à limiter les déplacements des « éleveurs transhumants » à l’intérieur du territoire national (matériellement impossible on le sait) et à sécuriser la fabrication et l’attribution des documents d’identité et de voyage (il n'est un secret pour personne que les Soudanais détiennent les documents d’état civil tchadiens grâce à l’incurie de Déby et de son administration corrompue).

 

Moins logique, plus surprenante et surtout manifestement illégale, est la mesure consistant à interdire aux citoyens tchadiens d’écouter de la musique soudanaise. Le compte-rendu précise, en effet, que « dans le domaine culturel, le Gouvernement décide de bannir la musique soudanaise non seulement sur les antennes des médias publics et privés mais également dans le commerce et en toute circonstance ». Il poursuit en disant que « le Gouvernement demande aux médias publics et privés de promouvoir la musique tchadienne dans toute sa diversité ».

 

Passons sur la violation de la loi par les autorités qui ne l’ont d’ailleurs jamais appliquée. Radio et télé publiques sont devenues la voix de la tyrannie institutionnelle. Les radios privées n’existent plus pour programmer de la musique, tchadienne soit-elle. Les commerçants auront toujours des produits de substitution à vendre. Ces mesures sont donc ni plus ni moins qu'un coup d'épée dans l'eau.

 

Début de folie

 

Interrogeons-nous cependant sur le fait de savoir en quoi écouter de la musique soudanaise chez soi, en privée, dans sa propre maison ou à l’occasion d’une fête, est-il un acte d’incivisme ou de soutien indirect à l’armée soudanaise (c’est ce que sous-entend une mesure aussi idiote) ?

 

La musique soudanaise est-elle l’équivalent de l’hymne national de ce pays ?

 

Est-elle un chant de guerre ?

 

Si c’est le cas, pourquoi ne pas interdire aux citoyens de manger du Kissar, du Tahnia, bref de bannir, par exemple, « le soufra 14 préfectures » inspiré de la gastronomie soudanaise ?

 

La promotion récente de la culture soudanaise dans notre pays est faite par ceux-là même qui, aujourd’hui, la vouent aux gémonies. Ils se saluent en soudanais, parlent comme eux, s’habillent comme eux, et surtout se divertissent comme eux en engageant des orchestres soudanais à l’occasion de leurs cérémonies festives. Les bazaga, les Kidi gouranes, les saye, et autres danses et musiques nationales sont considérées par nos élites et leurs progénitures comme moins évoluées par rapport aux sons et chorégraphies soudanais.

 

Inlassablement harcelé par les rebelles, plus que jamais dos au mur et sa sachant sans le soutien des Tchadiens, Idriss Déby perd progressivement la raison. Contre ce mal, ni son armée de mercenaires, ni son nouveau gouvernement de nourriture, ni la France, ni Kadhafi n’y pourront rien.

 

Le moment est peut-être venu de vous reposer, Monsieur le Président, pour ne pas sombrer dans la folie.

 

En attendant, chers fans de Kabli et autres Moubarak, sachez que l’interdiction de la musique soudanaise sur l’ensemble du territoire national n’est pas une « décision temporaire et superficielle mais une (des) mesures structurelles durables » prises par le gouvernement ainsi que le précise le compte-rendu du conseil des « milices » du 12 mai 2008. Une autre dérive totalitaire pour vous annoncer que tant qu’il est en vie, Déby sera toujours chef de l’Etat au Tchad.

 

N’espérez donc pas une levée prochaine de l’interdiction, sauf un vent salvateur venu de l'Est. Dansez votre dernier slow et cachez vos CD. Rien que ça !


Lyadish Ahmed

 

Genève, le 16 mai 2008

Tag(s) : #Tchad
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