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Lire l'interview sur le site de Human Rights Watch

 

hqdefault.jpgAvez-vous été au moins une fois favorable à ce que le Président Idriss Déby, qui était quand même un dignitaire du régime de Habré, soit impliqué dans le procès ?

Idriss Déby est impliqué dans le dossier. Il était le commandant en chef de l’armée tchadienne pendant un moment particulièrement meurtrier qu’on appelle communément « Septembre noir ». A ce titre, il faut qu’il s’explique. Il faut que sa participation soit examinée. Je ne dis pas qu’il a commis des actes ou non. Mais je pense que le fait qu’il ait été commandant en chef et souvent dans le sud du pays, physiquement en 1984 et 1985, l’oblige à s’expliquer sur ces faits. Maintenant, on ne peut pas mettre sur le même pied l’exécutant qu’aurait été Idriss Déby, d'une part, et le chef suprême qu'était Hissène Habré d'autre part. Il faut aussi savoir que Idriss Déby a été écarté de tous les pouvoirs décisionnels en 1985, puis envoyé par Hissène Habré à Paris. Il était physiquement écarté du Tchad. Quand il est revenu en 1987, je crois, il n’était que conseiller sans pour autant avoir de pouvoir décisionnel. Sa responsabilité comparée à celle de Hissène Habré est infime. La responsabilité de Habré, d'après les documents de la police politique (Direction de la Documentation et de la sécurité, DDS), NDLR), et les témoignages des anciens membres de cette structure, est écrasante. Il faut savoir que l’instrument principal de répression au Tchad a été cette DDS qui était créée par Hissène Habré. Elle était mise sous sa propre autorité. Elle ne rendait compte qu’à lui. Les directeurs de la DDS étaient des parents et des proches de Habré...

Il semble pourtant que Déby ait dirigé la DDS.

Il n’a jamais été (il ne termine pas la phrase) et ça, je ne sais pas d’où ça sort ! Il était à un moment conseiller militaire et sécuritaire. Mais il n’avait jamais de pouvoir décisionnel. Il n’était jamais dans la chaîne. Si vous parlez aux anciens de la DDS, si vous regardez les documents de la DDS, vous ne verrez jamais, jamais, son nom. Nous, nous avons des milliers de documents de la DDS, et le nom de Idriss Déby n'y figure nulle part. Par contre, celui de Hissène Habré y figure systématiquement. D’après des témoignages tirés des documents en 1987, quand il y avait malaise chez l’ethnie Hadjarai et que certains ont formé un groupe armé d’opposition, c’est Hissène Habré qui a mis en place une commission spéciale pour l’interrogation et la répression des Hadjarai. Et c’est cette commission qui a supervisé l’arrestation, la torture et même l’expulsion des Hadjarai. Le 1er avril 1989, quand Idriss Déby, Hassan Djamous et Mouhamed Itno rompent avec Hissène Habré et prennent le maquis, ce dernier met en place une nouvelle commission pour la traque des Zagawas. Cela a abouti à des arrestations, dans plus de quarante localités, ordonnées par le président de la République.

A ce titre, vous pensez que Déby est actuellement intouchable ?

Non je ne dis pas qu’il est intouchable ! D’ailleurs une des raisons de ce procès, c’est de lancer un avertissement à Idriss Déby et pour dire à ceux qui ont le pouvoir actuellement qu’il y a des limites, que votre prédécesseur est en train d’être jugé pour avoir dépassé ces limites. Gare à vous si vous dépassez ces limites vous aussi ! Ce procès est délicat pour Idriss Déby à plusieurs titres. Ce n’est pas seulement dû à son implication personnelle dans le régime de Hissène Habré, c’est parce que quand vous êtes un Président autocrate, c’est mauvais pour vous que votre prédécesseur soit jugé.

Vous pensez que Idriss Déby est un président autocrate?

Oui.

Et c'est quoi, pour vous, un autocrate ?

Je pense que c'est un Président qui utilise souvent des méthodes peu démocratiques.

 

Lire l'interview sur le site de Human Rights Watch

Tag(s) : #Tchad
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